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Géraldine Pailhas

En ouvrant le bal des actrices de la pièce « L’amour, la mort, les fringues » (déjà un énorme succès à Paris) et en partageant l’affiche du film de Thierry Klifa « Les yeux de sa mère » avec Catherine Deneuve, Géraldine Pailhas la discrète s’affirme définitivement comme la grande comédienne que les César n’avaient pas manqué de remarquer il y a presque 20 ans déjà !

ToutMa : Vous venez tout juste de fêter vos 40 ans et le même mois, vous foulez les planches du théâtre pour la première fois. Y-a-t-il un lien entre ce cap important et l’attrait du théâtre ?

Jusqu’à maintenant, je n’ai pas eu de projets qui me donnent envie, le courage surtout, de monter sur les planches. Les dates ne m’intéressent absolument pas. Là, il s’agit d’une opportunité tellement légère, qui m’a parue assez facile et qui me permettait de retrouver des copines et de s’amuser vraiment ensemble ! On aura peut-être même l’occasion de revenir…

TM : « L’amour, la mort, les fringues » est une superbe production de comédiennes orchestrée par la talentueuse Danièle Thompson, que vous connaissez bien puisqu’elle est votre belle- maman. Ce n’était pas angoissant de faire l’ouverture de ce bal des actrices ? En bref, comment avez-vous vécu cette expérience insolite ?

GP : Au contraire ! C’était bien plus facile d’être les premières ! Bien sûr, on a un peu essuyé les plâtres car c’est avec nous que Danièle Thompson a vérifié sa mise en scène. C’était même plutôt agréable… Je crois que j’aurai eu du mal à suivre si j’avais dû passer après. Je ne sais pas si j’en aurai eu le courage… Mes partenaires avaient toutes déjà fait du théâtre… aussi au début, toute ma solidité d’actrice a volé en éclats au profit de doutes. J’ai ressenti un peu de paralysie, plus qu’un trac, une souffrance, avec la peur de ne pas plaire. Mais elles étaient toutes là pour m’aider, avec une solidarité pas mièvre ! J’ai aimé ça.

TM : Chaque mois, de janvier à mars, 3 groupes de 5 comédien nes défilent sur scène. Que pensez-vous de votre casting ? Qui vous a le plus impressionnée ? Avec quelles autres comédiennes sélectionnées auriez-vous aimé jouer ?

GP : Les rôles sont équilibrés donc très différents, avec pour chacune des moments de bravoure… difficile de juger ! Je suis amie depuis longtemps avec Karine Viard, je la connais bien. Sur scène, elle est très impressionnante. J’ai vraiment découvert Valérie Bonneton. Elle est drôle, fine, capable de tout. C’est une actrice prodigieuse. Caroline Proust a la partie la plus dure de la pièce car son rôle est le plus sinistre. Et pourtant je la vois s’épanouir de jour en jour. Bernadette Lafont est à part dans la distribution. Elle fait un monologue de bout en bout… Elle me bouleverse. A 72 ans, elle essaie tous les jours de s’améliorer. Pour ce qui est des autres comédiennes, j’aurai adoré rejouer avec Miou-Miou ou encore Ariane Ascaride que j’admire énormément.

TM : Aurez-vous la curiosité de voir la prestation de toutes les autres actrices ou est-ce déjà fait dans l’intimité de vos répétitions de votre casting ? Qui vous a le plus impressionnée ? Avec quelles autres comédiennes sélectionnées auriez-vous aimé jouer ?

GP : On n’a pas du tout accès aux répétitions des autres groupes ! Mais oui, je vais toutes aller les voir. Toutes celles qui sont programmées en février sont venues à nos représentations, elles ont jubilé ! Je m’en fais une joie d’avance… J’ai très hâte.

TM : Quelle sont vos relations avec les fringues ? quelles sont celles que vous portez en toutes circonstances ? ou celles que vous n’avez jamais osé porter ?

GP : Là-dessus, je suis débarrassée de toute névrose… Je m’en fiche totalement. C’est jeans, t-shirt en général… ça doit être facile ! J’ai les mêmes affaires décliné es en 5 exemplaires, de différentes couleurs, manches courtes, longues etc. J’ai évidemment eu des périodes très fantasques, surtout pendant mon adolescence à Marseille. J’aimais beaucoup la mode, je portais des guêtres multicolores. Je n’aimais pas pour autant la marginalité et supportais mal les moqueries. Aujourd’hui, j’aime les histoires de silhouettes, l’androginie, donc porter des vêtements qui accentuent le côté filiforme. Pour moi, c’est une forme d’élégance.

TM : Le 23 mars prochain, vous êtes à l’affiche du dernier film de Thierry Klifa « Les yeux de sa mère ». C’est la 3ème fois que vous tournez avec lui. Vous considère-t-il comme une égérie ? qu’est-ce que vous aimez chez ce réalisateur ?

GP : Son égérie, ça, il faudra lui poser la question. Ce film est né d’une envie de retravailler avec Catherine Deneuve et moi. Thierry est un ami de longue date qui travaille beaucoup avec Christopher (Thompson, son mari). Je l’aime profondément et j’aime ses films. Je suis actrice mais être interprète bien souvent ne me suffit pas. Et lui m’offre cette collaboration absolue. Je suis alors la plus heureuse !

TM : Vous retrouvez donc l’immense Catherine Deneuve. Vous avez eu la chance de tourner avec de grandes stars. (Marlon Brando, Johnny Depp, Yves Montand) Cela change-t-il quelque chose pour vous, sur votre façon de jouer ?

GP : Honnêtement ? ça ne m’a jamais impressionnée. J’ai toujours pensé que si je laissais la place à ce sentiment, j’allais me priver d’une relation de femme à femme ou de femme à homme. Je veux être l’égale de ces acteurs sans me sentir écrasée par leur ombre. Catherine Deneuve et moi nous croisons très peu dans ce film. Je donne davantage la réplique à Marisa Paredes, autre immense actrice. Mais Catherine, je la connais dans la vie. Elle possède une telle capacité de renouvellement… Je veux être comme elle, toujours en quête.

TM : Dans ce film, vous incarnez une danseuse étoile, fille d’une star de la télévision, victime d’une biographie non autorisée et de l’intrusion de cet écrivain dans votre vie privée qui va provoquer des dégâts. Vous avez fait le choix très tôt de protéger votre vie privée et semble-t-il, de la privilégier. Pourquoi ?

GP : Je n’ai pas mesuré cela. Je ne l’ai pas fait en ce rapport. C’est ma nature profonde d’avoir peur de l’intrusion… Je me sens très vite envahie par une demande quelle quelle soit. Je ferme vite la porte. Les gens qui me connaissent à travers mon travail apprécient ma discrétion. Au début de ma carrière, j’ai été confrontée à la démesure, j’ai défilé sur une multitude de plateaux, été très sollicitée par les médias et puis je me suis demandée « qu’est-ce que ça m’apporte, à moi, Géraldine ? ». En plus, je n’ai vraiment pas une vie qui puisse susciter un intérêt quelconque ! (rires)

TM : Votre compagnon Christopher Thompson, est le co-scénariste de ce film et a fréquemment travaillé avec Thierry Klifa. Vous travaillez donc souvent en famille. C’est parce que cela vous pro- cure un sentiment de sécurité ?

GP : Pas du tout ! Bien au contraire, la famille, dans ce domaine, me sclérose plutôt. C’est d’ailleurs la première fois que je travaille avec ma belle-mère. Et avec Christopher, en comptant Bus Palladium, ça fait 4 fois. J’aime être avant tout un individu autonome et indépendant… je ne suis pas à la recherche de la facilité. J’ai juste la chance d’être bien entourée !

TM : Vous êtes originaire de Marseille… Une enfant du pays dont nous sommes tous fiers. Vous arrive-t-il d’avoir envie de revivre dans cette ville ? quels sont vos lieux préférés, vos habitudes lorsque vous êtes de passage ?

GP : Y revivre à plein temps, non… Je suis à Paris depuis trop longtemps. J’adore venir à Marseille, c’est comme un retour aux sources. Quand je viens, je me nourris d’images, je me revois à tous les âges. Je n’y ai plus vraiment mes habitudes car je suis surtout chez ma mère, dans le 9ème arrondissement. C’est elle qui m’emmène… les lieux changent tellement. J’aime la nature environnante, les calanques, Luminy. J’y ai encore des amis, certains que j’ai retrouvés récemment. J’ai mes copines Hortense et Marina. Et puis il y a Christophe Bouffil que j’aime énormément. C’est lui qui a réalisé mes premières photos, chez moi, un jour d’hiver 1987… un réalisateur les a vues et voilà… Je suis ravie que les gens de ma ville s’intéressent à moi. Cela me touche vraiment ! Je suis comme tous les Marseillais, je porte haut les couleurs de ma ville. J’adore.
Filmographie
1988 / Trois places pour le 26, de Jacques Demy
1989 /Haute tension – Retour à Malaveil, de Jacques Ertaud
1991 /La Neige et le Feu, de Claude Pinoteau César du meilleur espoir féminin / Les arcandiers, de Manuel Sanchez
1992 / IP5 : L’île aux pachydermes, de JJ. Beineix
1993 / Comment font les gens, de Pascale Bailly
1994 / La folie douce, de Frédéric Jardin / Suite 16, de Dominique Deruddere
1995 / Don Juan DeMarco, de Jeremy Leven / Le Garçu, de Maurice Pialat / Tom est tout seul, de Fabien Onteniente
1997 / Les Randonneurs, de Philippe Harel
1999 / Peut-être, de Cédric Klapisch
2000/ La Parenthèse enchantée, de Michel Spinosa
2001 / La chambre des officiers, de François Dupeyron
2002 /L’Adversaire, de Nicole Garcia
2003 / Le coût de la vie, de Philippe Le Guay / Nomination au César de la meilleure actrice dans un 2nd rôle
2004 / 5×2, de François Ozon / Les Revenants, de Robin Campillo / Une vie à t’attendre, de Thierry Klifa
2005 / Les Chevaliers du ciel, de Gérard Pirès
2006 / Je pense à vous, de Pascal Bonitzer / Le Héros de la famille, de Thierry Klifa
2007 / Le Prix à payer, de Alexandra Leclère
2008 / Didine de Vincent Dietschy / Les Randonneurs à Saint-Tropez de Philippe Harel / Espion(s) de Nicolas Saada
2010 / Bus Palladium, de Christopher Thompson
2011 / Les yeux de sa mère, de Thierry Klifa