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Ali BOUGHERABA dans la peau d’Yves Montand

Ali Bougheraba, auteur et comédien Marseillais, a co-écrit la pièce « Ivo Livi ou le destin d’Yves Montand » avec Cristos Mitropoulos. Le résultat sur scène est jubilatoire ! Tout y est : chant, danse, passion, volonté, chance…  la pièce est d’ailleurs nominée aux Molières 2017. Ce spectacle musical pas comme les autres n’est à manquer sous aucun prétexte. Les Marseillais auront la chance de le voir en unique représentation au Théâtre Silvain, en plein air, dans le cadre du Festival « des Mots, des étoiles » dirigé de main de maître par Marianne Callebout, qui sait comme personne sélectionner la pépite scénique de l’année. Rencontre avec le principal responsable de cet ovni théâtral, Ali Bougheraba…

ToutMa : Comment vous est venue l’idée d’un spectacle sur Yves Montand ?

Ali Bougheraba : Au départ, j’essayais d’écrire un spectacle sur René Sarvil qui créait des opérettes à Marseille dans les années 30 et je galérais. Mon producteur m’a alors parlé d’Yves Montand et là, j’ai fait un salto arrière sans toucher mon slip… Pourquoi n’y avais-je pas pensé plus tôt ?! Son histoire a tellement de similitudes avec la mienne : comédien Marseillais issu de l’immigration – lui italienne, moi maghrébine – le départ à Paris pour aller bosser… En regardant son parcours, on se rend compte qu’il a tout réussi alors qu’il n’était pas fait pour ça. C’est uniquement grâce à son travail, et aussi aux magnifiques rencontres qu’il a faites, notamment Edith Piaf et Simone Signoret…

TM : Vous semblez connaître avec précision l’histoire d’Yves Montand. Avez-vous beaucoup lu ?

AB : Je connaissais, comme tout le monde, son amour pour le communisme et le fait qu’il se soit « tapé » Marylin. Il fait partie du patrimoine marseillais ! Avec l’équipe, nous avons vu tous ses films, les documentaires, les interviews, les différentes biographies. Et surtout, j’ai imposé à la troupe de faire le rodage du spectacle à Marseille. Et là, c’était magnifique : c’était pas complet tous les soirs mais parmi ceux qui venaient, certains l’avaient vraiment côtoyé. Ils nous attendaient à la fin de la représentation et nous donnaient des détails sur sa vie. Des femmes – qui se faisaient coiffer au salon de sa sœur – nous le décrivaient à la perfection.

TM : C’est audacieux de s’attaquer à un tel personnage. Quand vous êtes-vous dit « Allez on y va » ?

AB : On n’a pas le temps d’y penser. C’est seulement le jour de la première qu’on se dit « Go » ! Et puis, le spectacle est toujours perfectible.

TM : Pour arriver jusqu’à Paris, ce n’est jamais facile. Comment vous êtes-vous retrouvés à la Gaîté Montparnasse ?

AB : Pascal Guillaume, notre producteur avait prévu de nous programmer dans son théâtre (Tristan Bernard) à partir de janvier 2017. Mais l’été auparavant, nous étions au Festival d’Avignon et là, ça a marché tout de suite ! Ce n’était pas blindé mais dans la rue tout le monde parlait de nous. Nous étions le « coup de cœur » du Festival, et là, on a commencé à nous gratter des invitations (rires). L’avant-dernier jour, Louis-Michel Colla, le directeur du Théâtre de la Gaîté est venu au spectacle. Il nous a rejoint à la fin et nous a dit, de sa voix nasillarde : « Vous m’avez bouleversé, je vous veux en septembre chez moi ».

TM : La première parisienne a eu lieu devant un parterre de stars, notamment en présence de l’épouse d’Yves Montand, Carole Amiel et de son fils Valentin. Comment se sentait la troupe ? Quelles ont été les réactions ?

AB : Ce n’était pas la première fois qu’on les voyait. Ils sont venus en Avignon et la pression était énorme. On a entendu des applaudissements dans la salle. Faut dire qu’il ne passe pas inaperçu, Valentin le beau gosse ! Carole non plus d’ailleurs. J’ai ouvert le rideau et dit « Oh, c’est eux ! Pourvu qu’on ne saccage pas la mémoire de son père ». Valentin connaît son père comme nous, à travers ce que les gens racontent de lui… et  il a été le premier à se lever à la fin. Nous avons longuement discuté ensuite et ils sont revenus deux fois voir le spectacle. Pour la première à Paris, il y avait « Bebel » (NDLR Jean-Paul Belmondo) dans la salle, ce n’est pas n’importe qui et je me suis retrouvé par hasard au même restaurant que lui après la représentation, On me l’a présenté, il a adoré la pièce, m’a félicité, j’ai
« kiffé ma race » !

TM : La nomination aux Molières 2017 a-t-elle été une surprise pour vous ?

AB : Je m’en fous un peu. On a fait d’autres spectacles peut-être aussi bien que celui-là et on n’a jamais été nominés. Alors oui, je suis flatté mais si en 2015 Pascal Guillaume ne flashe pas sur moi, ça ne serait jamais arrivé. Il est « un producteur à Molière ». Mais on est content d’y être quand même !

TM : Et jouer « Ivo Livi » à Marseille ne vous met-il pas encore plus de pression ?

AB : Notre production a calé une date pour le Festival « des Mots et des étoiles » et on en est ravis ! Il est super ce festival. J’y ai joué une opérette « Un de la Canebière » il y a quelques années. Et j’ai toujours envie de jouer chez moi, ce n’est pas pareil, c’est tellement populaire. Les vieilles chantent pendant le spectacle, on entend – avé l’accent – « mon Dieu qu’il est con ! » à certaines répliques. Quand on parle du quartier de la Cabucelle, ils connaissent. C’est un public difficile mais c’est le meilleur !

TM : A un moment, vous jouez vous-même Yves Montand dans le spectacle. Alors, ça fait quoi d’être une star ?

AB : En fait, quand je le joue, il est à la fin de sa vie. Je suis content de faire la partie la plus sage de sa vie. Je suis alors un papi provençal. J’aime interpréter son lâcher-prise. C’est mon avis, mais lorsqu’il tourne son dernier film, il laisse faire la fatalité, il a tout eu dans sa vie, c’est fini, il ne se bat plus…

Ivo Livi ou le destin d’Yves Montand
mercredi 5 juillet au Théâtre Silvain
271 Corniche JF Kennedy Marseille 7ème
_www.desmotsdesetoiles.fr