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Le savoir-faire des filles Ravel

Les filles Ravel sont comme leur entreprise : belles, natures, vraies, simples et avec du caractère ! Nées toutes deux à Aubagne avec quatre ans d’écart, Marion (l’aînée) et Julie (la cadette) dirigent aujourd’hui la célèbre maison Ravel, même si le papa, officiellement à la retraite, reste très actif dans l’entreprise familiale. Ainsi les « Poteries Provençales » de leur nom initial, sont dirigées par la famille depuis cinq générations. Elles ont été fondées en 1837 par Marius Decroix, lequel ayant deux filles ne pouvait envisager, à l’époque, de léguer son entreprise à sa descendance directe. Une de ses filles, Rose, épouse ainsi un certain Philogène Ravel (d’où le nom de la marque du linge de maison aujourd’hui) qui va récupérer le bébé. « C’est la première fois depuis leur création que les Poteries Ravel sont dirigées par des filles ! » confient fièrement les deux sœurs.

Toutes les deux ont fait des études de commerce à Aix-Marseille, puis à Paris. Marion rejoint l’entreprise en 1994 et sa sœur Julie quatre ans plus tard. Pendant des années, elles vont travailler aux côtés de leur père pour apprendre le métier : « On a toujours baigné dans les poteries ! À table, quand on était petites, ça parlait four, argile, machine, savoir-faire… » raconte Marion. « Au départ, mon père pensait que ce n’était pas un métier de femmes. Il nous voyait plutôt faire un métier comme notre mère par exemple, laquelle était prof » ajoute Julie, qui conclut : « C’est vrai que c’est un métier très prenant, mais de nos jours beaucoup de femmes font des métiers très prenants. C’est seulement quand on soulève des pots de 30 kilos que l’on se dit que ça doit être plus facile d’être un homme. Mais on ne fait pas ça tout le temps heureusement ! ».

C’est le père des filles, Jacques Ravel, qui a lancé la marque Ravel au moment où le jardin particulier, jusque-là un luxe, s’est largement démocratisé. Ensuite avec les deux filles, l’équipe s’est un peu féminisée dans le commercial et à la boutique. La production a évolué, devenant plus design, colorée, avec de la fantaisie et de la variété. Depuis quelques années, la marque se développe dans l’aménagement : hôtels, villes et univers de l’architecture. Les deux sœurs travaillent aujourd’hui sur des projets paysagistes avec de très gros contenants ; c’est dans cet esprit-là que Ravel sera présent au MuCEM et au Fort Saint-Jean à Marseille.

Dernière création en date, cette belle ligne de linge de maison « Philogène Ravel », à base de lins épais aux couleurs du sud qui vient compléter parfaitement la vaisselle et les poteries classiques ou plus modernes, car, outre les vases classiques et contemporains, les sœurs Ravel ont tenu à maintenir les vases historiques. Pour Marion : « Une jarre traditionnelle, avec une plante qui retombe dessus, c’est tout simple, mais il n’y a rien de plus beau, c’est la ligne qui est belle tout simplement ».

Autre particularité et nouveauté féminine : travailler avec des artistes et des designers. Les designers, ce sont elles qui vont les chercher, pour qu’ils créent de nouvelles collections. C’est le cas de la dernière création « Uluru » du designer Jean-Marie Massaud exposée et vendue en ce moment. Les artistes, quant à eux, viennent produire librement chez Ravel, comme Gérard Traquandi, en résidence à la manufacture depuis quelques années. Et, pour profiter du côté culturel de la région avec MP 2013, la maison Ravel propose en ce moment une exposition « Fil Rouge » où l’on peut découvrir les pièces des différents artistes et designers qui ont travaillé pour la marque : Traquandi et Massaud bien sûr, mais aussi Jean-Jacques Surian, Olivier Gagnère, Christian Tortu et l’incontournable Philippe Starck !

Les filles Ravel ont également largement développé l’accueil dans leur établissement. Visiter les ateliers et voir les artisans travailler les poteries en direct, c’est intéressant pour les particuliers, les visiteurs, les groupes, les touristes ou les écoliers. Une balade éducative autant que touristique, parce qu’authentique et traditionnelle. Vente directe à la fabrique, boutique d’usine, journées portes ouvertes, grandes tablées ou jardins d’hiver : le lieu est toujours habité et accueillant !

Aujourd’hui, les Poteries Ravel continuent à pratiquer un management familial avec une vingtaine d’employés. « Même si c’est un peu paternaliste, il ne faut pas oublier les avantages que cela crée dans le travail au quotidien. Et c’est tellement plus humain… » explique Marion.

Dernièrement, les Poteries Ravel ont obtenu le label EPV « Entreprise du Patrimoine Vivant », un titre réservé aux entreprises françaises ayant « un savoir-faire rare et unique ». Mais il n’y a pas que le savoir-faire qui est rare et unique ici, il y a quelque chose d’autre… Quand on va chez Ravel, non seulement on a envie de tout acheter, mais, en plus, on aimerait y travailler ! Voilà peut-être ce qui est encore plus rare et unique que le savoir-faire : donner du sens au travail.