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Caroline Pozmentier

Pour ToutMa, Agnès OLIVE, écrivaine, romancière et éditrice, vous raconte le parcours d’une femme qui vit et travaille dans le Sud. Toujours de belles histoires de femmes.

Caroline Pozmentier a toujours quelque chose à défendre. « Chez moi c’est un besoin vital de lutter contre les injustices, cela vient sûrement de la transmission inconsciente des histoires familiales en même temps que de la grande Histoire avec un grand H » dit-elle.

Caroline, qui est née à Bordeaux d’une mère Bordelaise mais a grandi avec ses parents à Marseille, a pris son père pour modèle, Serge Pozmentier, arrêté avec sa mère la veille de la grande rafle du Vel d’Hiv en juillet 1942 et sauvé miraculeusement du commissariat dans la nuit, alors que la grand-mère de Caroline est déportée et assassinée à Auschwitz. Très jeune, Caroline observe ce père, engagé depuis toujours, faire du bénévolat, dans le sport, dans son quartier, auprès d’associations, de missions, toujours enclin à aider les autres, à s’occuper d’eux, à les écouter, « il voulait protéger les siens, mais les siens se retrouvent très vite être tout le monde, un grand cercle d’amis de tout milieu social et de toutes origines » se souvient-elle, « sans oublier que derrière un grand homme se cache toujours une femme d’exception, ma mère. Ensemble, ils nous ont inculqué la tolérance, le respect et la joie de vivre ! Vous savez, ça compte la bonne humeur, c’est une politesse. »

Son histoire familiale fait d’abord prendre conscience à Caroline du miracle de vivre dans un pays libre et démocratique. Si elle veut devenir avocate c’est pour défendre les autres, avec au fond d’elle un besoin permanent de réparation du statut de la femme comme de celui de « l’étranger » : « Je suis un vrai mélange, mes grands-parents sont d’un côté des Russes Polonais, de l’autre des Italiens et des Franco-Belges. J’ai toujours ressenti la France comme une terre d’accueil pour eux tous. Je représente la troisième génération qui a profité de cette immigration et de leur intégration, et je suis consciente de la chance que j’ai eue en étant la première femme de la famille à pouvoir faire des études. Je vis ça non pas comme une revanche mais comme un cadeau. Quelquefois j’ai l’impression de faire tout ce que je fais pour les femmes de ma famille, même si je n’ai aucun problème à vivre, travailler et échanger avec les hommes ! ».

Caroline privilégie d’abord ses études de Droit. Elle obtient un DEA en sciences pénales et criminelles, devient avocate, son rêve depuis qu’elle est toute petite. En même temps elle fonde une famille. Pourtant très vite elle a envie de plus. Elle entre alors dans une association caritative qui œuvre pour la défense des plus démunis en France et en Israël, ce qui la ramène aux valeurs du scoutisme et de l’entraide des « Eclaireurs Israélites de France » auxquels elle était très attachée quand elle était jeune. Puis en 1995, pour les élections municipales elle participe à la campagne en tant que simple militante dans le secteur où elle vit, le 11ème et 12ème arrondissement. « Déjà à l’époque la politique m’attire, mais je ne me sens pas encore prête, parce que je m’occupe de mes enfants et de mon travail, c’est déjà beaucoup, et faire de la politique en plus, pour une femme, ce n’est pas évident quand on est jeune, et qu’on a des enfants petits… ». Mais le besoin de s’engager est très fort et Caroline rentre au Comité Directeur du CRIF, ce qui pour elle est un engagement politique important et très « formateur ». Elle continue, quelques temps après, avec la Chambre de Commerce France Israël Marseille : « Á Marseille où je suis complètement ancrée, mes enfants aussi, je voulais apporter quelque chose de plus, participer à l’évolution et au développement de cette ville, et là j’ai eu l’idée et l’occasion extraordinaire de pouvoir relancer la Chambre de Commerce Franco-Israélienne. Le but de cette association est de faire rencontrer des acteurs économiques, scientifiques et culturels Israéliens et Marseillais, de les mettre en contact, pour qu’ils construisent ensemble des projets. Entre Marseille et Israël, il y a des valeurs communes mais surtout il y a un très grand sujet : la Méditerranée ! ».

Marseille, porte de la Méditerranée. Pour Caroline, « Marseille est une mosaïque, une ville multiculturelle et « multicultuelle », et je veux la défendre. Je me sens Euro-méditerranéenne. J’y crois. C’est le rendez-vous que doit avoir la ville de Marseille au 21ème siècle, et dans ce challenge être une femme est un formidable atout étant donné la place ancestrale des femmes en Méditerranée. On peut y arriver. Marseille a beaucoup à donner, c’est une ville généreuse ». Le sens politique se développe petit à petit chez l’avocate et ce n’est pas un hasard si le Maire de Marseille demande à Caroline d’être porte-parole de sa campagne !… Dans la foulée, après sa réélection en 2008, Jean-Claude Gaudin lui confie la délégation de la « Police Municipale et Prévention de la délinquance ». Et quand on lui demande si ce n’est pas un peu un « boulot d’homme », elle répond : « J’ai eu ce poste par rapport à mon parcours mais aussi parce que je suis une femme. En dehors du regard et de la qualité d’écoute des femmes, il y a leur pragmatisme, les femmes agissent toujours pour défendre ce à quoi elles croient. C’est bien simple, en politique rien ne vaut une femme qui a des convictions : vous ne pourrez jamais l’arrêter ! ». Aujourd’hui Caroline a mis son activité professionnelle d’avocate en sommeil, pour se consacrer entièrement à son nouveau métier : la politique.

Mais la petite-fille de Rachèle Pozmentier déportée par le convoi n°11 à Auschwitz, continue le combat, sur tous les fronts, dès qu’elle pense qu’elle peut être utile. Ainsi pour la transmission de la Mémoire, elle travaille à l’AFMA (Association pour la Fondation Mémoire d’Auschwitz) aux côtés de sa Présidente Ida Palombo, en participant aux « Voyages de la Mémoire » chaque année à Auschwitz, et puis les conférences, les débats, les rencontres, « il y a toujours à faire, ce n’est jamais gagné, il faut continuer à se battre »…

 

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